LE courage, ça n’existe pas

« Le courage, ça n’existe pas. » Ces mots peuvent sembler provocateurs, mais ils résument une vérité que beaucoup ignorent. Chaque jour, nous faisons des choix basés non pas sur une force intérieure mystique, mais sur une simple évaluation des avantages et des inconvénients. Dans cet article, nous explorerons comment le courage, tel que généralement perçu, est en réalité une question de perception individuelle et de circonstances personnelles.

Relativité du Courage

Le courage n’est pas une notion absolue. Ce qui est perçu comme courageux pour une personne peut ne pas l’être pour une autre, en fonction de leurs expériences de vie, de leurs peurs et de leurs valeurs. Par exemple, je connais une dame qui a peur des souris et rats. La tentation serait grande de penser qu’elle manque de courage puisque moi je n’ai pas peur de ces animaux. Mais, cette même dame n’a pas peur des araignées, faisant d’elle quelqu’un de courageux à mes yeux puisque j’ai peur de ces insectes à huit pates. Peut-on être à la fois courageux et peureux?

Balance Avantages/Inconvénients

Nos décisions sont souvent le résultat d’une évaluation des avantages et des inconvénients, plutôt que d’un acte de bravoure pure. Lorsque j’ai décidé de me lancer dans une formation en coaching alors que je savais que j’allais me mettre en danger, moi qui ai peur des inconnus et des situations de performance sociale, ce n’était pas par courage, mais parce que j’y voyais plus d’avantages que d’inconvénients. Pour moi, les avantages de devenir coach, la perception que j’allais pouvoir offrir une meilleure vie à mes enfants et que j’allais pouvoir aider des jeunes qui ont les mêmes problèmes que moi étaient plus importants que les inconvénients de rencontrer des inconnus et de faire des jeux de rôles avec ceux-ci.

La Balance Décisionnelle : Un Outil de Réflexion

La notion de balance décisionnelle, développée par Janis et Mann, renforce cette idée. Ils ont conçu une approche structurée pour évaluer les avantages et les inconvénients des choix de manière équilibrée, ce qui aide à réduire les regrets postérieurs à la décision. En divisant les raisons en colonnes « pour » et « contre », ils ont montré comment une réflexion vigilante peut mener à des décisions mieux informées et plus satisfaisantes​ (Cambridge)​.

Benjamin Franklin, dans une lettre à Joseph Priestly en 1772, a décrit une méthode similaire pour prendre des décisions difficiles en listant les arguments pour et contre et en pesant leur importance respective. Cette méthode rationnelle et équilibrée est considérée comme une première forme de l’intervention de balance décisionnelle en psychologie​ (Cambridge)​.

Une Approche Psychologique du Courage

Les théories psychologiques, notamment le modèle transthéorique du changement de comportement (Transtheoretical Model, TTM), soutiennent l’idée que les décisions, y compris celles qui impliquent le courage, sont influencées par une balance des avantages et des inconvénients perçus. Selon ce modèle, les individus passent par différentes étapes de changement en pesant continuellement les bénéfices et les coûts de leurs actions​ (Cambridge)​.

L’entretien motivationnel (Motivational Interviewing), une technique utilisée en thérapie cognitive, illustre bien cette approche. Cette méthode aide les individus à explorer leurs ambivalences en évaluant de manière équilibrée les arguments pour et contre un changement, facilitant ainsi une prise de décision informée et autodéterminée. Cela correspond à votre vision selon laquelle le courage est une question de choix, où les avantages perçus de l’action surpassent les inconvénients ou les peurs associées​ (Cambridge)​.

Impact de l’Éducation et des Traumatismes

Notre perception du courage est fortement influencée par notre éducation et nos expériences traumatisantes. Une personne qui a été encouragée à surmonter les obstacles dès son plus jeune âge percevra peut-être moins d’inconvénients à affronter ses peurs. En revanche, quelqu’un qui a vécu des traumatismes non résolus pourrait voir ces mêmes actions comme insurmontables. Dès lors, le courage n’est pas une qualité intrinsèque, mais une réponse contextuelle à notre environnement et à notre histoire personnelle.

L’éducation joue un rôle crucial en façonnant la perception des risques et des bénéfices associés aux actions courageuses. Les traumatismes passés et la manière dont ils ont été gérés influencent également la capacité d’un individu à surmonter ses peurs. Les environnements qui mettent davantage l’accent sur les avantages de prendre des risques tendent à encourager des comportements que l’on qualifie de courageux​ (Cambridge)​.

Évolution des Choix

Nos choix évoluent en fonction de notre perception des avantages et des inconvénients. Les avantages d’une situation peut évoluer d’une personne à l’autre, d’une situation à l’autre en fonction des valeurs de chacun .Par exemple, avant j’avais peur d’aller dans les petits commerce car j’avais de devoir parle aux vendeurs. Si un article que je souhaitais acheté n’avait pas de prix, je ne l’achetais pas.

Un jour, j’ai accompagné une connaissance qui voulait acheter des tapis de sol pour sa voiture. Il n’y avait pas de prix sur ceux qui l’intéressaient. Visiblement, lui non plus n’aimait pas demander le prix à un vendeur. J’ai donc pris les tapis de sol et demandé le prix à un vendeur. Non pas parce que je suis devenu plus courageux mais parce que, selon mes valeurs, aider quelqu’un est tellement important que ma peur de parler à un vendeur revêtait moins d’importance.

Répondre aux Contre-Arguments

Certains pourraient dire que le courage consiste précisément à surmonter ses peurs. Mais en réalité, lorsque quelqu’un surmonte une peur, c’est souvent parce que les avantages perçus surpassent les inconvénients de cette peur.

Voici quelques exemples marquants :

1. Malala Yousafzai

Dans son livre « I Am Malala », Malala Yousafzai raconte comment elle a été saluée pour son courage après avoir été attaquée par les talibans pour avoir défendu le droit des filles à l’éducation. Malala explique que son désir d’éducation et son rêve d’égalité des genres ont surpassé la peur des représailles. Elle décrit les avantages qu’elle voyait : la possibilité d’inspirer d’autres filles, de changer les mentalités et de créer un avenir meilleur pour les femmes au Pakistan .

2. Viktor Frankl

Dans « Man’s Search for Meaning » (en français « Découvrir un sens à sa vie »), Viktor Frankl raconte son expérience en tant que survivant des camps de concentration nazis. Frankl explique que sa volonté de trouver un sens à ses souffrances et d’aider ses codétenus à faire de même lui ont donné la force de survivre. Il explique que cette quête de sens a été plus puissante que les horreurs quotidiennes qu’il endurait, le poussant à des actes de courage qui ont été salués par d’autres survivants .

3. Nelson Mandela

Dans « Long Walk to Freedom », Nelson Mandela raconte sa lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. Salué pour son courage, Mandela explique que sa vision d’une nation libre et égale a toujours surpassé les risques personnels, y compris la prison et la persécution. Il décrit comment sa détermination à obtenir la justice et l’égalité a guidé ses actions et lui a donné la force de continuer malgré les obstacles .

4. John Lewis

John Lewis, dans son autobiographie « Walking with the Wind », explique son rôle dans le mouvement des droits civiques aux États-Unis. Salué pour son courage, Lewis décrit comment son engagement pour l’égalité raciale et la justice sociale a surpassé la peur des violences policières et des arrestations. Il parle des avantages qu’il voyait dans chaque acte de désobéissance civile, notamment la progression des droits civiques et l’inspiration donnée aux générations futures .

Conclusion

En fin de compte, le courage n’est pas une qualité mystérieuse réservée à quelques-uns. C’est une évaluation personnelle et contextuelle des avantages et des inconvénients, parfois consciente, souvent inconsciente. Nous sommes tous courageux à notre manière, en fonction de nos histoires de vie et de nos perceptions. Le vrai point est que ce que les gens perçoivent comme du courage n’est qu’un choix dont la balance penche plus du côté des avantages que des inconvénients. Alors, la prochaine fois que quelqu’un vous traite de mauviette, rappelez-vous que ce qui compte, c’est votre propre évaluation des situations et non un standard universel de bravoure. Par ailleurs, si vous vous trouvez dans une situation où le courage vous manque, vous pouvez soit élargir votre vision pour voir en quoi surmonter cette peur peut répondre à vos valeurs les plus hautes, soit diminuer l’impact émotionnel de l’événement passé que vous ne voulez pas revivre, soit tout simplement accepter que cette situation ne vous correspond pas. Après tout n’est-ce pas aussi faire preuve de courage que d’accepter qui on est et de vivre sa vie en fonction de nos valeurs?

Sources :

  • Motivational Interviewing and Decisional Balance. Behavioural and Cognitive Psychotherapy, Cambridge Core.
  • The Transtheoretical Model of Health Behavior Change. American Journal of Health Promotion.
  • Balance Decisionnelle et Réflexion Vigilante. Janis et Mann, Decision Making: A Psychological Analysis of Conflict, Choice, and Commitment.
  • Chat GPT

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